« Le Seigneur soit avec vous », les quatre salutations de la célébration eucharistique

28 janvier 2011: Salutation lors de la messe, égl. Saint François d'Assise, Paris (75), France.

28 janvier 2011: Salutation lors de la messe, égl. Saint François d’Assise, Paris (75), France.

« Lorsque le chant d’entrée est fini, le prêtre, debout à son siège, fait le signe de la croix avec toute l’assemblée. Ensuite, en saluant la communauté rassemblée, il lui signifie la présence du Seigneur. Cette salutation et la réponse du peuple manifestent le mystère de l’Eglise rassemblée. » (Présentation générale du Missel romain, n°50)

Ce dialogue nous est familier et, par quatre fois, la célébration eucharistique le met en œuvre. La salutation du prêtre à laquelle répond l’assemblée joue donc un rôle important. Quelle est son origine ? Comment faut-il la comprendre ?

Une origine lointaine

Le Dominus vobiscum, traduit par « Le Seigneur soit avec vous » est une formule très ancienne. Il apparaît au début du IIIème siècle dans deux anciens formulaires de la prière eucharistique : la Tradition apostolique d’Hippolyte et l’anaphore (prière eucharistique) syrienne d’Addaï et Mari. Au IVe siècle, on trouve la trace de la réponse des fidèles : « Et avec votre esprit ». La formule a une origine scripturaire : « Je serai avec toi ! ». Voilà ce que Dieu dit à Moïse au moment où il lui donne la mission de faire sortir le peuple d’Egypte (Ex 3, 12). Plus tard, ceux qui dans le peuple de Dieu, reçoivent une mission spéciale de service sont affermis par cette même promesse : « Le Seigneur sera avec toi ». Ce sera le cas pour Josué, les juges, David, les prophètes et la Vierge Marie, que l’ange Gabriel salue par un « Le Seigneur soit avec toi » (Lc 1, 28). Et quand la promesse s’accomplit, Jésus est l’Emmanuel, le « Dieu avec nous » (Mt 1,23). Enfin, au terme de l’Apocalypse, on peut lire : « Et lui, Dieu-avec-eux, sera leur Dieu » (Ap 21,3). On voit bien la densité de la salutation liturgique, qui n’a rien de banal.

Son sens

« Le Seigneur soit avec vous ». S’adressant aux fidèles rassemblés, le célébrant leur souhaite la présence du Ressuscité. Ainsi, d’entrée, sont indiqués les principaux partenaires de la célébration liturgique : le Christ et l’assemblée, le prêtre agissant comme ministre, c’est-à-dire comme serviteur de la rencontre qui va se dérouler ou qui déjà se déroule. Cela nous rappelle encore que la prière liturgique n’est pas un devoir individuel mais la prière de l’Eglise toute entière.

« Et avec votre esprit ». Au souhait du prêtre, l’assemblée répond par un autre souhait : que le Seigneur soit avec lui en ce qu’il a de plus spirituel pour accomplir son service liturgique. Elle désigne le souflle qui fait de cet homme un prêtre, l’Esprit qu’il a reçu au jour de son ordination. De ce fait, le prêtre ne préside pas de sa propre initiative : seul l’Esprit Saint fait de lui le président de l’assemblée. Ce dialogue introduit véritablement à la célébration pour laquelle les baptisés sont réunis en présence du Christ ressuscité.

Une attitude intérieure

Comment recevoir et vivre cette salutation ? Le souhait du prêtre à l’assemblée nous renvoie à l’annonce de l’ange à Marie et cela ne peut que nous réjouir : dès l’entrée en célébration, la présence du Seigneur parmi son peuple est effective. Nous sommes constitués partenaires du Seigneur et c’est le fondement même de la prière, qui consiste à s’adresser à quelqu’un, à entrer en dialogue avec le Seigneur présent. Et c’est toujours Lui qui fait le premier pas en s’adressant à nous par la voix du célébrant. Ainsi, à plusieurs reprises, l’assemblée est invitée à entrer en lien avec le Christ et, par Lui, avec le Père, attitude intérieure fondamentale de toute prière chrétienne.

Quatre fois dans la célébration eucharistique

La salutation du célébrant à l’assemblée est lancée quatre fois. Ainsi est relancé le souhait d’une présence active du Seigneur et d’une communion des fidèles à sa venue :

  1. Au début de la messe, le souhait concerne toute la célébration ;
  2. Avant l’évangile, il porte sur la Parole que l’on va entendre et qui réalise la présence de Dieu parlant à son peuple, mais également sur l’homélie, la profession de foi et la prière universelle, qui en constitueront la réponse ;
  3. Dans le dialogue initial de la prière eucharistique, il vise toute l’action d’offrande eucharistique que le Seigneur va présenter à son Père en rassemblant son offrande dans la sienne ;
  4. Enfin, avant la bénédiction, le souhait s’étend, par cette bénédiction et l’envoi, à toute la semaine qui s’ouvre par la célébration du jour du Seigneur.

Ce simple dialogue est révélateur de ce qu’est la liturgie : Dieu se donne par l’intermédiaire de ses ministres et, à ce don, répond la foi de son peuple.

Que le Seigneur soit avec nous à chacune de nos célébrations et dans toute notre vie.

Serge KerrienDiacre du diocèse de Saint Brieuc-Tréguier

Approfondir votre lecture

  • Procession d'entrée de la messe des Cendres.

    Les entrées en célébration

    Il ne s’agit pas du premier chapitre d’un livre de cuisine (!) mais d’interroger les différents moyens par lesquels nous entrons en célébration. La structure des rites d’ouverture de la messe (entrée des ministres et chant-introït, Kyrie, prière) nous est familière. Mais on peut aussi se rappeler l’entrée spécifique du dimanche des rameaux (et de la Passion du Seigneur), de la Présentation du Seigneur, ou encore l’entrée lors de la célébration d’un baptême d’enfant.

  • Le symbolisme de la porte comme entrée dans le mystère du Christ

    Les civilisations anciennes ont toujours reconnu une dimension symbolique à la porte, qu’elle introduise à la ville, au palais, ou au temple.

  • Le rite pénitentiel et l’aspersion durant le Temps pascal

    On a tous vu, une fois ou l’autre, au début d’une célébration eucharistique solennelle ou télévisée, le président asperger généreusement l’assemblée d’eau bénite. Utilisant souvent un bouquet de branches de cèdre ou d’olivier, il s’exécute en traversant la foule tandis qu’un chant festif souligne le caractère baptismal de l’action posée.